Bande-annonce impossible d’un projet abandonné, LA TACTILIA se situe dans l’ombre de la vidéo Habib/Kelly/Émilie. Ombre? Plutôt schème invisible, à la fois prologue et postface. Ici, les adolescents sont propulsés dans un univers rétro-futuriste, à mi-chemin entre les représentations ténébreuses de cités imaginaires de science-fiction (Blade Runner) et les devantures lumineuses de services de restauration rapide (kebab). Précisément, entre dystopie réaliste et réalisme dystopique. En faisant la promotion du d’un néologisme hasardeux, «tactilia», la bande annonce glisse sur les images à la vitesse de solos de guitares acérés et lyriques, ;-) invitant à redécouvrir les trois adolescents dans l’ambiance télévisuelle d’une sitcom hallucinée et onirique.
Objet filmique autonome et viral, LA TACTILIA résume bien la démarche d’Arnaud Dezoteux. C’est paradoxalement par le truchement de l’artifice outrancier qu’il s’est progressivement intéressé à l’humanité de ses personnages, cette irréductible fragilité faite de rapports de force et d’incertitude. Inventant les prémisses d’un nouveau genre, que l’on pourrait nommer “de-compositing” - réalité augmentée puis appauvrie - Arnaud Dezoteux s’approche d’un réalisme improbable. Dans ces portraits de figurants/acteurs, s’expérimente l’hypothèse selon laquelle une accumulation d’effets agirait comme révélateur. Les vidéos d’Arnaud Dezoteux contiennent en filigrane l’hypothèse d’un nouveau naturalisme post-Raëlien.
Guillaume PARIS/ Arnaud DEZOTEUX